dimanche 3 mars 2024

Le Tournoi de Ploërmel (Compte-rendu de partie)

Printemps 1354. Une trêve a enfin été conclue après les récents revers militaires du roi de France, Jean II, le Bon. Cette dernière doit se concrétiser sous peu par la signature d'un traité. Celui-ci fait la part belle aux Anglais et à la Navarre qui va littéralement se retrouver à la tête d'un domaine aussi grand que l'ancien duché de Normandie.  

    Les chevaliers bretons, anglais et français ont eu vent du grand tournoi organisé pour le roi de France par le Maréchal de France, Arnoul d’Autrehem près le château et la ville de Ploërmel. C’est pour tous,  l’occasion de s’y illustrer et d'empocher une belle récompense, estimée à 1000 écus. 

C'est ainsi là, que vont converger les anciens protagonistes de la guerre de succession de Bretagne, que vous avez peut-être déjà croisés dans nos aventures. 

     Cette partie a été jouée à Theix, le 3 Mars 2024 lors du festival "Ramène tes jeux" et a mis à contribution 7 joueurs dont votre serviteur, scénariste et PNJ de l'aventure. Certains personnages sont fictifs d'autres ont bel et bien existé, mais pas forcément exactement cette année là. La règle utilisée est "Argad", légèrement aménagée pour les joutes.

Les joueurs : 

- Patrice (franco-breton, blésiste) incarnera Bertrand du Guesclin et Robert de Beaumanoir,

- Jean-Jacques (breton, blésiste); Olivier de Tournemine et Rohan de Montauban.

- Jacques (Anglo-breton, monfortiste): Olivier de Salisbury et J. de Comper

- Dominique (Anglais): Robert Knoles et Thomas Dagworth,

- Laurent (Breton, blésite): Guillo Clerc et la Roche-Bernard, 

- Ehouarn (Breton, monfortiste): Auffret du Cosquer et Lesnerac, 

- Nicolas (tous les PNJ) dont Arnoult d'Autrehem (Français), Raoul de Tours (Français), Per de Quimerch (Breton, montfortiste), Geoffroy d'Harcourt (Français mais soutien du roi de Navarre)

    Les Français, organisateurs, sont arrivés les premiers et se sont installés, près des faubourgs de Ploërmel. Les Bretons et les Anglais sont ensuite arrivés en ordre dispersés et ont investis le bocage, proche de la lisse ou les joutes allaient se dérouler. 

Le théâtre des joutes et la campagne environnante

La tribune pavoisée ou siègent les nobles dames, le maréchal de France et les personnalités locales.

Tout proche, le camp des Français Raoul de Tours et Arnoult d'Autrehem.

La camp de Guesclin et Beaumanoir, puis, celui de Tournemine et Montauban.

Les anglo-bretons Salisbury et Comper. Les armoiries ont été reproduites sur papier pour tous les jouteurs et ont permis de tirer au sort les rencontres lors des affrontements.

    Le Maréchal Arnoult d'Autrehem ouvre les jeux par un grand banquet de bienvenue, le premier soir. Puis ménestrels et jongleurs divertissent les chevalier et les nobles dames. Il est prévu que les joutes commencent par l'affrontement, en lisse, des écuyers désireux de faire reconnaître leurs talents. Chaque chevalier y enverra le sien.

Jongleurs et ménestrels divertissent le public en attendant le début des joutes.

Les deux premiers écuyers s'élancent. A chaque passe victorieuse, on dispose un pion de "lance brisée" de son côté.

    Pour les joutes, j’avais imaginé un système simple et totalement compatible avec "Argad". Il a été le suivant. Les écuyers ont jouté avec 1D et une classe 4, les chevaliers avec 2D, classe5.

Les règles de la joute.


Règles de joute :

La joute se déroule en 3 passes au cours desquelles les participants cherchent à rompre des lances, si ce n’est à désarçonner leur adversaire.

Nous partirons du principe que chaque chevalier participant se voit doté de deux dés 6 pour ses affrontements (on garde le meilleur, un double 6 équivaut à un 7 naturel).

Prise d’élan : 2D

1-2 : Rate son départ. Pas d’élan de charge

3-6 : Bonus de charge de cavalerie (+1)

7 : Assiette parfaitement stable, Idem + donne un bonus de +1 au test pour éviter d’être désarçonné.

Toucher : 2D

1 naturel : Coup bas qui blesse le cheval adverse = élimination directe du tournoi.

2-5 (modifié par l’éventuel +1 de charge de cavalerie) : Coup mal ajusté. Pas le bonus de lance couchée.

6-7 : Le coup porte : Bonus de +1 lance couchée. Vérifier si l’adversaire est désarçonné.

8 : Habile coup au heaume. Bonus de +1 de lance couchée, +1 de localisation au heaume. Vérifier si l’adversaire est désarçonné.

Désarçonné ? 1D

De 6 à 8, l’adversaire doit faire un jet pour voir s’il est désarçonné. Ce jet se fait sous la classe, à 1 seul dé, avec les modificateurs suivants :

Classe de celui qui teste + 1 (si avait une assiette stable) -1 (si touché normal) ou -2 (touché au heaume). Le jouteur qui chute est éliminé quelque que soient ses scores antérieurs.

S’il échoue, il chute de cheval. Refaire un jet, un nouvel échec signifie une blessure réelle, à localiser. Un chevalier blessé, joutera à -1 pour toucher et être désarçonné.

Qui gagne ?

S’il n’y a pas eu un adversaire éliminé par chute ou éliminé par blessure du cheval adverse, le gagnant est celui qui totalise le plus de lances cassées, c’est-à-dire, plus de meilleurs scores que son adversaire. Certains jouteurs peuvent avoir un bonus qui leur donne la victoire en cas d’égalité. En dehors de ce cas de figure : en cas d’égalité de score, les deux adversaires doivent se départager à pied, à l’arme courtoise. Le combat prend alors sa forme classique, sans blessures (armes émoussées). Si les deux adversaires ont été désarçonnés en même temps procéder de la même façon à l’affrontement aux armes courtoises. Le premier qui touche son adversaire (seul) gagne.


    Ce sont finalement deux écuyers français qui se distingueront le premier jour et qui affronteront leurs aînés le lendemain. 

En cas d'égalité, un combat à pieds, avec des armes courtoises départage les combattants.
 

Le deuxième soir voit fêter les écuyers victorieux. Nombreux sont ceux qui se rendent à l'auberge pour arroser l'événement. Du Cosquer entreprend de courtiser deux villageoises très entreprenantes...



 

    Du Guesclin connaît la réputation de Du Cosquer et sa faiblesse pour les choses du sexe. Il hait cet homme qui l'a jadis fait prisonnier et l'a fait rançonner. Aussi a t-il payé deux accortes jeunes femmes pour lui faire passer une nuit inoubliable mais surtout épuisante, afin qu'il soit hors d'état de jouter le lendemain. Auffret du Cosquer ne dort pas de la nuit et boit plus que de raison. C'est affublé d'un terrible mal de tête et d'un -1 à tous ses jets qu'il devra jouter le lendemain. 

    Il s'est cependant passé un drame beaucoup plus grave durant la nuit. L'écuyer de Dagworth a disparu. Le mot court de camps en camps et on lance des recherches. Sir Dagworth craint qu'il ait trahi mais il n'en est rien. On retrouve le corps du malheureux non loin de là. Il a été tué au couteau. Personne n'a rien entendu au milieu du charivari des différents campements. Un chien de chasse tentera de lever une piste, mais sans succès. 

Le corps de l'écuyer anglais est retrouvé caché sous des buissons.
 

     Sir Dagworth se retrouve privé de son écuyer. Un autre de ses suivants, peu expérimenté,  le servira pour les joutes à venir.  

    Les chevaliers vont se présenter aux dames et rivalisent de rodomontades et de compliments pour s'attirer l'attention et les faveurs des belles. Trois d'entre eux se verront gratifiés d'un ruban pour les représenter dans leurs prouesses martiales.

Les premiers chevaliers s'élancent...
 

Des montures sont blessées, des cavaliers désarçonnés !

 

De façon très surprenante, Raoul de Tours est mortellement blessé dans sa passe contre Sir Thomas Dagworth.

Le chevalier mourant est promptement éloigné et reçoit l'extrême onction.

 

    A la suite de ce drame, le maréchal de France, Arnoult de Vautrehem se montre particulièrement magnanime, rassurant même Sir Dagworth sur son intégrité et sur les risques inhérents à ce dangereux sport guerrier. Se montrant grand prince à l'égard de cet Anglais qui vient pourtant d'occire un Français, il a une arrière pensée. Il va essayer de recruter un maximum de ces chevaliers désormais désœuvrés, du fait de la trêve.

    Sur place, quelques chevaliers ont trouvé l'accident louche. Comper et Dagworth ont bien regardé les lances fournies, à la recherche de quelque malfaçon mais sans rien y trouver d'anormal. Tournemine qui a eu le même pressentiment va pourtant les trouver plus lourdes, trop lourdes. Elles ne sont pas en peuplier ! Il va, le soir même, s'en confier à d'Autrehem. Celui-ci l'invite à fermer les yeux,invoquant les intérêts supérieurs du royaume de France. Tournemine obtempère mais enquête pourtant. Il découvre qu'une transaction a eu lieu entre Raoul de Tours et d'Autrehem. Raoul de Tours aurait transporté une grosse somme d'argent à destination du roi de France. En échange de quel service? Il l'ignore.

          Cette seconde journée de joute a vu un certain nombre de chevaliers se faire éliminer. La tentation devient grande d'essayer d'infléchir un peu plus le destin. C'est ainsi que Comper va offrir un tonneau de vin frelaté à son voisin direct, Rohan de Montauban. Celui-ci, sentant le coup foireux, fait venir quelques paysans du cru à sa table et les abreuve largement du breuvage suspect. Les trois hommes boivent largement, profitant de l'aubaine inespérée. Ils s'effondrent. Le plus atteint des trois en décédera même. Évidemment, Montaubant interdit à ses propres hommes de toucher au poison galamment offert par son fourbe voisin. 


Montauban teste le vin suspect sur des paysans du coin, qui s'effondrent.


        Le troisième jour de joute, verra s'affronter les meilleurs des chevaliers toujours en lisse. La rumeur commence à circuler qu'à l'issue des jeux, le maréchal de France compte recruter tous les chevaliers volontaires et leurs lances, moyennant une forte rétribution. 

    Au même moment et à l'insu du maréchal, un mystérieux émissaire rencontre tous les chevaliers qui ne sont pas du parti du roi de France et tente de les dissuader de s'enrôler sous les couleurs françaises. Il s'agit de Geoffroy d'Hartcourt, capitaine de Rouen et Caen. Pourtant vassal du roi de France, ce dernier travaille secrètement pour le roi de Navarre, Charles le Mauvais et ne tardera pas à trahir officiellement la couronne de France. Il redoute que le Roi Jean II ne se retourne contre Charles le Mauvais, qui a aussi des prétentions sur le trône de France.

La finale voit s'affronter Rohan de Montauban et le bâtard de Quimerch. Montauban désarçonne ce dernier et empoche les 1000 écus.

    Montauban est acclamé et fêté comme il se doit. Arnoult d'Autrehem rassemble alors les chevaliers et leur fait part de son désir de les enrôler et de payer grassement leurs mérites s'ils servent sous la bannière de France. Avisés, les monfortais et les anglais refusent. Les autres se massent et rassemblent leurs suivants pour faire valoir leur valeur et montrer leurs équipements.

D'Autrehem paye grassement toutes les lances qui se joindront à lui pour les prochaines campagnes.
 

Les lances françaises et blésisites répondent toutes présent.
 

C'est ainsi, une force importante et entraînée qui est recrutée.

 

    Les monfortistes et les anglais se sont aussi regroupés de leur côté, craignant quelque revers de médaille. Il n'en sera rien. L'objectif du Français est ailleurs. 

Révélation du plan français:

 Arnoul d’Autrehem, a reçu, pour le roi de France, une somme très importante d’un des vassaux de ce dernier, Raoul de Tours, contre reconnaissance de dette. Or, il n’a aucune envie de restituer la somme à ce dernier. Le royaume de France est exsangue, pris à la gorge. Le récent traité, signé avec les Anglais suite aux récentes défaites est très désavantageux. En outre, il fait la part belle à la Navarre qui se retrouve littéralement dépositaire du Duché de Normandie.

Jean le Bon, (bien mal nommé) a donc élaboré un plan perfide faisant d’une pierre, trois coups. Déposséder un de ses puissant mais timoré vassal de sa fortune. Se débarrasser de lui au profit de son frère, plus fidèle. Utiliser l’argent récupéré pour recruter sur place, tous les chevaliers désœuvrés afin de les envoyer combattre contre la Navarre. 

Pour l'éliminer, des lances lourdes seront substituées aux lances de joute habituelles, dans les joutes contre Raoul de Tours. Pour se faire, sans risque d’être démasqué, il suffira de faire disparaître l’écuyer de son adversaire afin qu’il ne puisse pas se rendre compte de l’anormalité du matériel. Les juges seront complices. Si cela ne suffisait pas, Bertrand Du Guesclin, serait alors mis dans la confidence (mais il vaudrait mieux qu’un minimum de personnes soient impliquées), et l’affronterait lors d’un second tour, soigneusement orchestré. L'idéal serait qu’aucun lien ne puisse être fait avec la France, les juges arrangeront le tirage au sort des rencontres de façon à impliquer un Breton ou un Anglais. Arnoul d’Autrehem se montrerait alors très bienveillant à l'égard du malheureux chevalier responsable du trépas de son infortuné adversaire. Le personnel chargé d’évacuer Raoul de Tours s’emparerait alors du précieux document. 

Initialement, c'est du Cosquer qui devait être ciblé par la machination. Mais l'état lamentable dans lequel il s'était mis a nécessité de trouver une autre victime. Se sont les brigands qui ont été recrutés pour appâter et éliminer le malheureux écuyer.  

J'avais délibérément mis de côté les papiers avec les armoiries des deux impliqués dans la machination et n'importe quel joueur présent aurait pu se rendre compte que le hasard du tirage des adversaires dans les joutes... n'était pas que du hasard. Ils se seraient alors vu révéler que cette rencontre étaient organisée par les juges. 


Bilan: 

 Une très belle table, de beaux décors et de belles figurines, des joutes endiablées mais fluides, une intrigue partiellement découverte par quelques joueurs mais pas aucun dans sa totalité, une bonne ambiance. Je n'y ai vu que du positif, mais je n'ai pas recueilli tous les avis. Merci pour les plaques de terrain, Eric. 

Je m'attendais à plus de perfidies de la part des concurrents. Or , ceux-ci se sont montrés plutôt très chevaleresques. Ils auraient pu empêcher leurs adversaire de dormir (bordel insistant, la nuit, autour de leurs tentes), les faire boire (deux tentatives ont eu lieu, l'une réussie, l'autre non), empoisonner leurs chevaux (laurier rose dans leur fourrage), déstabiliser le cheval du jouteur dans sa course (lâcher de cochon devant lui)... ou tout ce qu'ils auraient pu imaginer d'autre. 

 

 Y'a un peu plus, je laisse? 

Quelques détails et précisions sur la construction des décors spécifiques à ce tournoi.


La tribune, vue de dos, et la haie de la lisse ont été fabriquée en balsa .

Comme à mon habitude les drapés et toiles de tentes sont en essuie-tout + colle PVA diluée. 

Les lances et les râteliers d'armes sont en bois.

Les boucliers sont en carton bombé, les fleurs de lys et le tissu ont été peintes à main levée, avant application et mise en place sur la tribune d'honneur.

Les marqueurs "lances brisée" et les râteliers d'armes, en cours de peinture.



4 commentaires:

Codsticker a dit…

Great looking table, fun looking game. Your miniature carpentry is top shelf.

Eutha, l'archiviste. a dit…

Thank you, Codsticker

Patrice a dit…

Tout cela était très excellent. :)

...Je ne comprends pas bien où s'applique le “bonus +1 de lance couchée“ puisque le jet pour toucher a déjà été fait. Il rentre dans le jet pour désarçonner ?

« 6-7 : Le coup porte : Bonus de +1 lance couchée. Vérifier si l’adversaire est désarçonné.
8 : Habile coup au heaume. Bonus de +1 de lance couchée, +1 de localisation au heaume. Vérifier si l’adversaire est désarçonné. »

Eutha, l'archiviste. a dit…

Oui, c'est cela Patrice.